

INTENTIONS ARTISTIQUES
« Je trouve mes inspirations dans une observation du réel, en me laissant imprégner par ce que je perçois du monde, des autres, des corps en mouvement, des relations ; je m’intéresse toujours aux histoires intimes qui rencontrent la grande histoire, la question des choix que nous faisons et comment ils sont déterminés par nos relations, nos transmissions, notre histoire. Je crois que c’est le moteur de mon théâtre que d’essayer de rendre compte de cette sensibilité aux autres dans leur façon de vivre en relation avec leur milieu, et de faire de cela un endroit de partage, de débats, de questionnements communs.
Mais c’est la rencontre avec une écriture, un·e auteur·rice ou un texte qui m’invite à la création, qui me donne l’impulsion pour dessiner, construire, écrire, répéter un spectacle. Je m’intéresse aux écritures et aux auteur·rice·s vivant·e·s chez qui je sens une sororité dans la sensibilité et dans la démarche. D’abord, je suis sensible à la langue, le chant en quelque sorte qui va traverser le corps objet pour évoquer, poétiser une figure. Ensuite, j’aime sentir la démarche, l’engagement de l’auteur·rice à travers ce qu’il/elle écrit, j’entends son geste dans la façon d’approcher le réel : des auteur·rice·s documenté·e·s, archéologues ou anthropologues qui s’approchent tout près de leur sujet, qui sondent, et défrichent dans le vif. Ce sont souvent des auteur·rice·s qui aiment écrire avec le plateau ou à partir du terrain.
Enfin, dans la mise en scène je cherche comment la marionnette révèle quelque chose du texte sans en être l’illustration, et c’est souvent à l’endroit du frottement entre le réel et le symbolique que je trouve sa pertinence. La marionnette est un objet avec lequel l’acteur·rice joue pour évoquer une réalité qui se reconstitue dans l’imaginaire des spectateur·rice·s ; elle propose une représentation du monde qui permet de poser un regard sur celui-ci en construisant un sens, une histoire, une dramaturgie tout en révélant le geste d’écriture. C’est en ça que je vois dans les possibilités que nous offre la marionnette dans le renouvellement des écritures dramatiques contemporaines.
Les crises successives que nous traversons depuis 2020, a précipité en moi le désir d’explorer les nouveaux affects et nouvelles relations conséquentes aux mutations rapides de notre monde. Ne plus raconter un état de fait, mais une métamorphose en cours… c’est peut-être ce à quoi nous sommes désormais invité·e·s pour explorer des nouveaux imaginaires qui exhortent l’humain·e à se penser faisant partie intégrante de la nature et d’un monde commun. »
Émilie Flacher